Randianina RADILOFE, docteur en droit public, enseignant chercheur.
Philippe SAUNIER, professeur agrégé des Facultés de Droit, avocat.
Introduction
La Cour des Comptes de Madagascar suscite l’intérêt des bailleurs de fonds internationaux. Sur la base des indicateurs de la Public Expenditure and Financial Accountability (PEFA), initiée en 2001 par la Banque Mondiale, des États et banques multilatérales de développement, divers programmes d’amélioration des performances de l’institution malgache sont en cours. Le rapport couvrant la période 2018-2020 et financé par le Fonds Européen de Développement (FED) de l’Union Européenne comporte un pilier VII Supervision et audit externes consacré à la Cour des Comptes[1]. Si la performance globale de la juridiction est faible, l’institution n’en est pas pour autant périphérique[2]. Qualifiée d’Institution Supérieure de Contrôle des Finances Publiques (ISC), la Cour des Comptes s’est dotée en janvier 2020 d’un plan stratégique pour 2020-2024[3]. Ce plan a reçu l’appui de l’USAID avec quatre millions de dollars sur cinq ans[4]. Dans son discours du 12 février 2021, l’Ambassadeur des Etats-Unis, Michael Pelletier, remplacé depuis à ce poste, évoquait la cohérence de ce programme avec l’Objectif du Millénaire pour le Développement numéro 16 Paix, justice et institutions efficaces. Les impératifs de la gestion des finances publiques imposent que l’institution en charge des contrôles fasse elle-même l’objet d’une évaluation. La juridiction fondée en 1962, entre ainsi dans l’univers des indicateurs, des normes et des performances.
Plus récent encore, le projet conjoint USAID-PNUD de 2022 comporte un résultat intermédiaire 2 (IR2) Accès accru du GOM aux ressources financières pour le développement et gestion efficace des ressources financières[5]. Même si la Cour des comptes n’est pas directement concernée par le programme centré sur les juridictions civiles et commerciales, on observe que la Cour Suprême, dont la Cour des Comptes est une composante, est un élément de gestion des risques dans la mise en œuvre du projet[6].
Parallèlement à l’appui des bailleurs internationaux, cette évolution reçoit le soutien du gouvernement malgache. En 2020, le rapport conjoint de l’Organisation Internationale des Institutions Supérieures de Contrôle des Finances Publiques (INTOSAI) et de la Cour des Comptes, souligne « l’engagement politique en faveur des ODD a été concrétisé par la prise de l’arrêté n° 24714/2015 du 28 juillet 2015 portant cadre institutionnel du processus des Objectifs du Développement Durable (ODD) »[7].
Sur un plan individuel mais hautement significatif, le secrétaire d’État américain Anthony Blinken a nommé le 9 décembre 2022, le président de la Cour des comptes de Madagascar, Monsieur Jean de Dieu Rakotondramihamina, champion international de la lutte contre la corruption[8].
Tant sur le plan international qu’interne, avec la détermination de personnalités malgaches de premier plan, tout converge en direction du rôle décisif de la Cour des Comptes.
Cela résulte logiquement de la position dominante de cette juridiction dans les textes nationaux, constitutionnalisée par l’article 121 de la constitution de la IV République de 2010 et faisant l’objet du titre III de la loi organique n°2004 – 007 du 26 juillet 2004 sur les lois de Finances. Si ce dispositif n’a rien de singulier, pratiquement tous les pays s’étant dotés d’une cour des comptes ayant adopté ce schéma, il en va de même pour les difficultés qu’elles rencontrent. Même la Cour des comptes française, source d’inspiration pour le contrôle juridictionnel en matière financière, avait éprouvé de grandes difficultés durant la période 2001-2005 et même après, à s’adapter au nouveau cadre fixé par la loi organique du 1er août 2001. Des juridictions de même type en Afrique sub-saharienne ne jouent aucun rôle effectif, non seulement en raison de la détérioration du contexte, mais aussi à cause d’une législation mal conçue brouillant les responsabilités des gestionnaires publics.
À Madagascar où existe aussi certaines difficultés, le cadre légal est en place pour l’exercice par la Cour des Comptes de ses compétences. Le titre V de la loi n° 2004-036 du 1er octobre 2004 relative à l'organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant, fixe les attributions de la Cour des Comptes et les procédures adéquates. La Cour est en charge du contrôle des comptes des comptables publics, du contrôle de l’exécution budgétaire, c’est-à-dire la gestion des finances publiques, et de l’assistance au Parlement pour les questions financières[9]. Or, l’exercice effectif de ces missions dépend de facteurs externes. Le contrôle des comptes, objectif, systématique et d’ordre public, est tributaire de la mise en état des comptabilités par les comptables principaux de l’État. Peut-être cela a-t-il à voir avec le fait que le dernier recueil des décisions de la Cour des Comptes malgache remonte à 1970. De même, l’appréciation portée sur « la qualité de la gestion dans l'exécution des lois de Finances » est conditionnée par la production du « compte général de l’administration des finances » annexé au projet de loi de règlement[10]. Les retards endémiques dans la production des comptabilités ne peuvent être portés au discrédit de la juridiction. À cet égard, le rapport annuel 2022 ne laisse aucun doute sur la lucidité de la haute juridiction financière sur les défaillances techniques qui affectent la mise en œuvre des politiques publique gouvernementales[11].
S’ajoute à cela un facteur de complication en provenance des Collectivités Territoriales Décentralisées. La loi n° 2001 - 025 relative au tribunal administratif et au tribunal financier, a créé un premier échelon juridictionnel. Selon l’article 130 de cette loi, « ces comptes (des collectivités territoriales) doivent être en état d'examen et appuyés des pièces générales correspondantes ». Le Tribunal financier se trouve, au niveau local, dans la même situation que la Cour des Comptes au niveau central. La gestion des finances publiques n’est jamais plus complexe qu’au niveau décentralisé où se conjugue défavorablement le manque de moyens budgétaires, les carences administratives et parfois des écarts en matière d’éthique, le tout pour des montants peu importants. Le récent rapport sur le suivi des activités d’orpaillage, a dû tenir compte de l’éloignement et de l’accessibilité du district de Tsaratanàna [12].
Que les rapports de la Cour des Comptes ne soient pas toujours suivis d’effets n’est pas caractéristique des pays en développement. C’est une conséquence de la séparation des pouvoirs et du caractère juridictionnel de l’institution. Il importe avant tout que les contrôles existent et exercent, même de manière limitée, une pression sur les administrations.
Toute institution est perfectible surtout dans le domaine du contrôle de gestion des ressources publiques. Le rapport PEFA 2021 déjà cité évoque des projets de réformes de la Cour des Comptes non encore adoptés[13]. En l’état du droit actuel, la Cour des Comptes est opérationnelle ; ce constat est loin de pouvoir être généralisé dans les pays en développement. Cependant, le fonctionnement régulier de la Cour des Comptes de Madagascar n’est pas une fin en soi. L’objectif ultime est l’emploi des fonds publics, nationaux ou internationaux, dans l’intérêt supérieur de la population malgache. La Cour des Comptes est un des multiples indicateurs permettant de corriger si nécessaire, cette trajectoire. Elle a au surplus le mérite d’être une institution nationale bien établie dans le système institutionnel, qui peut relayer des initiatives provenant de l’extérieur dont la réception locale est parfois difficile.
Sur le plan méthodologique, cette étude repose sur l’analyse des derniers documents disponibles auprès de la Cour des Comptes, mis en ligne sur le site internet de l’institution ou obtenus sur place dans les locaux. Les derniers comptes exécutés sont ceux de 2020. Les rapports, audits, contrôles exploités couvrent principalement les années 2020 à 2023, période difficile en raison de l’impact de la crise Covid 19. Ce sont les dernières productions en date de la Cour qui permettent de mesurer sa dynamique actuelle dans la perspective des évaluations internationales futures de type PEFA.
À ce stade, l’institution est en capacité de contribuer, dans les limites de ses compétences et de ses moyens, à l’assainissement des finances publiques malgaches et de promouvoir sur l’ensemble du territoire, une culture de performances dans la gestion des politiques publiques. Ce constat résulte de l’examen de la dimension institutionnelle de la Cour des Comptes (I), de l’évolution récente des missions de la Cour des Comptes (II) et de la dynamique de performances relative de la Cour des Comptes (III).
I. Dimension institutionnelle de la Cour des Comptes
Les juges financiers que sont la Cour des Comptes et les tribunaux financiers concentrent l’essentiel des compétences juridictionnelles et non-juridictionnelles relatives à la gestion des finances publiques. Créée par la loi n°61-013, la Cour des comptes, anciennement dénommée Chambre des comptes, représente aujourd’hui la plus haute juridiction financière de l’État malgache (A), et constitue une des branches principales de la Cour Suprême. (B)
A. La Cour des Comptes dans les instances constitutionnelles malgaches
Pour certains pays en développement, la création d’une Cour des comptes relève d’une obligation suprarégionale[14]. La Cour des Comptes malgache tire ses fonctions traditionnelles du modèle français[15]. Créée par la loi n°61-013 du 19 juillet 1961 portant création de la Cour Suprême, une section des comptes relevant de la chambre administrative est prévue, dont les attributions sont fixées par l’ordonnance n°62-074 du 29 septembre 1962 relative aux jugements des comptes et au contrôle des collectivités publiques et établissements publics. Elle est ainsi opérationnelle depuis le mois d’octobre 1963.
Deux ans plus tard, la loi n°65-016 du 16 décembre 1965 a érigé cette « simple » section d’une chambre administrative en véritable Chambre. Elle prend alors le nom de « Chambre des comptes de la Cour suprême », et devient la juridiction financière suprême jugeant en premier et dernier ressort les comptes des comptables publics. La Cour Suprême comprend ainsi trois Chambres : la Formation de Contrôle, la Chambre Administrative et la Chambre des Comptes.
Suivant le modèle français, cette dernière dispose d’ores et déjà d’une double fonction : la fonction traditionnelle de jugement des comptes publics, d’une part, et la fonction de contrôle du gouvernement par ses « informations, critiques et suggestions émises lors de son contrôle » lors de l’exercice de sa mission auprès des collectivités publiques et des entreprises d’État de manière générale, d’autre part.
En 1973, la Chambre des comptes a vu ses compétences s’étendre aux sociétés de droit privé dans lesquelles l’État, les collectivités et les établissements détiennent plus de 50% du capital social. De plus, se voit créer la même année le parquet auprès de la juridiction financière par l’ordonnance n°73-018 du 11 mai 1973 portant institution de la fonction de Commissaire du Trésor public auprès de la Chambre des Comptes. La création du parquet témoigne de cette volonté des autorités publiques de contrôler davantage l’utilisation des deniers publics[17].
La Constitution du 18 septembre 1992 modifiée par la loi constitutionnelle n°95-001 du 8 avril 1998 a renforcé l’organisation tripartite de la Cour Suprême en érigeant les trois chambres en Cours autonomes que sont la Cour de Cassation, le Conseil d’État et la Cour des Comptes. Faisant suite aux révisions constitutionnelles, le dispositif légal et réglementaire régissant ces – désormais – juridictions va alors faire l’objet d’une clarification avec l’adoption de l’ordonnance n°2001-004 portant loi organique relative à la Cour Suprême et aux Cours la composant du 18 novembre 2001[18].
Créée ainsi par la loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004 relative à l’organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant, la Cour des Comptes actuelle représente l’Institution Supérieure de Contrôle (ISC) suprême de Madagascar. Elle s’est vue confier pour compétence première de juger en premier et dernier ressort les comptes des comptables principaux de l’État[19].
Outre ses compétences juridictionnelles, elle détient également des compétences non-juridictionnelles qui l’amènent ainsi à contrôler l’exécution des budgets des provinces[20]. Elle procède à l’examen de la gestion des ordonnateurs du budget de l’État, des provinces[21]. Elle procède à l’examen de la gestion et des établissements publics nationaux et provinciaux à caractère administratif[22]. Elle contrôle les actes budgétaires des provinces[23]. Elle contrôle les comptes et la gestion des entreprises publiques, établissements publics et sociétés privées dont l’État dispose plus de 50% du capital[24]. Elle assiste le Parlement et le gouvernement dans le contrôle de l’exécution des lois de finances ou des budgets provinciaux[25].
Enfin, la Cour des Comptes peut être amenée à donner des avis d’ordre d’économique et financier ou donner son avis sur des projets de textes relatifs aux Finances publiques[26]. En 2022, la Cour a notamment fait l’objet d’une saisine du Ministre de l’Industrialisation, du Commerce et de la Consommation pour une demande d’avis relatif à la mise en place des fonds de concours. Il faut noter que, dans ce cadre, la Cour a fait l’objet de six saisines de la part des autorités gouvernementales. Si la saisine de la Cour des comptes à fin d’avis s’est diversifiée et recouvre plusieurs domaines dans la gestion des finances publiques, elle reste toutefois marginale compte tenu de l’expertise que la Cour peut apporter dans la gestion des finances publiques par les autorités gouvernementales[28].
Outre la Cour des Comptes, l’Institution Supérieur de Contrôle malgache se compose également de six tribunaux financiers prévus par la loi n°2001-025 relative au tribunal administratif et au tribunal financier. Si la Cour des Comptes juge en premier et dernier ressort les comptes des comptables principaux de l’État, les tribunaux financiers, quant à eux, jugent en premier ressort les comptes des comptables publics des collectivités territoriales décentralisées et des établissements ou organismes publics y rattachés, et ceux des comptables de fait des collectivités[30].
En plus de sa mission juridictionnelle, l’article 115 de la loi n°2001-025 du 21 décembre 2001 prévoit que le tribunal financier dispose d’une mission de contrôle de l’exécution des budgets des collectivités, des comptes des établissements publics relevant de ces collectivités et des actes budgétaires desdites collectivités. Enfin, il dispose d’une mission consultative auprès des autorités des collectivités décentralisées et du délégué général du gouvernement dans la province pour donner son avis sur tout projet de texte d’ordre budgétaire, financier ou comptable relatif à la collectivité concernée[31].
La création de ces tribunaux financiers se justifie aisément par la décentralisation progressive mise en œuvre au sein des institutions[32]. En effet, si la loi organique n°2014-018 du 12 septembre 2014 et la loi n°2014-020 du 27 septembre 2014 ne sont venues préciser que tardivement les contours de la décentralisation, dès l’indépendance de la République de Madagascar, la Constitution du 29 avril 1959 a prévu l’existence de collectivités décentralisées que sont les provinces et les communes à l’origine[33]. Par la suite, les Constitutions des Républiques respectives ont repris les principes de la décentralisation[34]. Il est alors devenu nécessaire d’accompagner la décentralisation dans ses différents aspects budgétaires, et notamment le contrôle de la gestion des collectivités décentralisées et le contrôle des actes budgétaires locaux[35].
Les juridictions financières malgaches relèvent donc de l’ordre financier, distinct de l’ordre administratif, mais rattachées au même titre que l’ordre judiciaire et administratif à la Cour Suprême, ce qui n’est pas sans conséquences sur son organisation et sa structure [36].
B. L’organisation des juridictions financières malgaches
La Cour des Comptes et les tribunaux financiers constituent le socle de l’ordre financier ainsi que le prévoit la Constitution de 2010 qui distingue l’ordre judiciaire, administratif et financier[37]. Si la Constitution distingue les trois ordres juridiques, la Cour Suprême reste l’instance suprême en charge de veiller « au fonctionnement régulier »[38]. L’article 3 de loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004 relative à l’organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant vient préciser son organisation.
En effet, elle est dirigée par un Premier Président et un Procureur Général, tous deux nommés par décret pris en Conseil des ministres. Le Premier Président est alors secondé par trois Vice-Présidents qui sont respectivement les Présidents des trois juridictions composant l’ordre juridique malgache. Le Procureur Général – à la tête du Parquet général de la Cour Suprême–, quant à lui, est secondé par le Procureur Général de la Cour de Cassation pour l’ordre judiciaire, le Commissaire Général de la Loi pour l’ordre administratif et le Commissaire Général du Trésor Public pour l’ordre financier[39].
Juridiction la plus élevée de l’ordre financier, et bien que rattachée à la Cour Suprême, la Cour des Comptes (le Conseil d’État et la Cour de Cassation respectant le parallélisme des formes) dispose d’une structure propre bicéphale – le Siège et le Parquet – dirigée respectivement par le Président et le Commissaire Général du Trésor Public. Le Siège de la Cour des Comptes est composé de six chambres dédiées respectivement au contrôle du secteur gouvernance, infrastructure, croissance, social, au contrôle juridictionnel et à l’évaluation des politiques publiques. Chaque chambre, dont les attributions sont déterminées par le règlement intérieur de la Cour Suprême, exerce alors le contrôle de la gestion des ministères et établissements publics, et domaines relevant de son champ de compétences. Quant au Parquet, il est dirigé par un Commissaire Général du Trésor public appuyé par des Commissaires du Trésor public, des Avocats Généraux et des Substituts Généraux.
Les articles 123 et 124 de la Constitution fixent le mode de nomination des Vice-Présidents de la Cour Suprême – dont la fonction se confond avec celle des Présidents respectifs des entités les plus élevées de l’ordre judiciaire, administratif et financier. Ces derniers sont nommés en Conseil des Ministres conformément aux propositions du Conseil Supérieur de la Magistrature dont le Président n’est autre que le Président de la République[41]. Il en est de même pour les membres du Parquet Général de la Cour Suprême.
En tant que Président du Conseil Supérieur de la Magistrature, la Constitution de 2010, en son article 7, dispose que le « Président de la République est garant de l’indépendance de la justice (…) assisté par (le) Conseil Supérieur de la Magistrature dont il est (donc) le Président ». L’indépendance de la justice est ainsi érigée en principe constitutionnel. Toutefois, son organisation traduit d’une part, l’influence exercée par l’exécutif, les magistrats dirigeants de la juridiction suprême et des cours qui la composent étant nommés en Conseil des ministres.
D’autre part, si l’indépendance de la justice est garantie par la Constitution, l’indépendance de la Cour des Comptes en tant qu’Institut Supérieur de Contrôle ne dispose pas de cette même garantie, au niveau constitutionnel comme au niveau légal[42]. En effet, si le Président de la Cour des Comptes est le président de la plus haute juridiction financière, son rôle se confond avec celui de Vice-Président de la Cour Suprême. Au même titre que le Président de la Cour de Cassation et le Président du Conseil d’État, le Président de la Cour des Comptes « seconde » le Président de la Cour Suprême[43]. Ces termes sont employés par les textes légaux eux-mêmes. Il faut également préciser qu’étant une composante de la Cour Suprême, la Cour des Comptes partage les locaux de la Cour Suprême elle-même au sein de la capitale à Antananarivo avec la Cour de Cassation et le Conseil d’État, et est séparée du Tribunal financier d’Antananarivo qui dispose d’autres locaux. La Cour des Comptes se rattache ainsi davantage à la Cour Suprême, qu’à l’ordre financier en lui-même.
Outre la qualité de Vice-Président de la Cour Suprême du Président de la Cour des Comptes, l’article 13 de la loi organique n°2004-036 prévoit un « contrôle technique de l’activité des magistrats du siège et du parquet de la Cour Suprême et des juridictions d’appel et d’instance ». Ce contrôle est alors exercé par les « magistrats de la Cour Suprême sous la direction des chefs de ladite Cour ».
Bien que l’article 14 de ladite loi précise que ce contrôle ne doit pas porter atteinte à l’indépendance des juges, la procédure de contrôle elle-même est de nature à porter atteinte à l’indépendance des juges. L’Institut Supérieur de Contrôle est contrôlé par une instance nommée par les autorités gouvernementales, ce qui pose la question de l’indépendance des juges de la Cour des Comptes[44].
Par ailleurs, cette question se pose davantage lorsqu’elle ne dispose pas des moyens nécessaires pour mener à bien sa mission en tant qu’« organe externe de contrôle des finances publiques »[45]. En effet, elle ne dispose pas d’un siège propre et le volume des crédits alloué à ses activités est faible[46]. Le budget général du contrôle externe des finances publiques tel qu’il ressort du document budgétaire annexe à la loi n°2022-015 portant loi de finances pour 2023 fait état d’un budget de 43 000 euros environ pour la Cour des Comptes, et de 10 300 à 11 500 euros pour les tribunaux financiers (voir notamment le tableau ci-dessous en Ariary).
Le budget général du contrôle externe des finances publiques pour 2023 se présente comme suit :
En ariary
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Loi de finances 2023
|
Prévision 2024
|
Prévision 2025
|
Total
|
Justice financière
|
Contrôle externe des finances publiques et assistance aux pouvoirs publics
|
Total
|
303 038 000
|
378 815 000
|
437 727 000
|
1 119 580 000
|
00 16 0 001 00000
|
Commission de contrôle du financement de la vie politique
|
90 800 000
|
113 491 000
|
131 166 000
|
335 457 000
|
00 16 0 031 00000
|
Cour des Comptes Antananarivo
|
212 238 000
|
265 324 000
|
306 561 000
|
784 123 000
|
Contrôle des finances locales et assistance aux collectivités décentralisées
|
Total
|
323 133 000
|
404 224 000
|
466 550 000
|
1 193 907 000
|
00 16 1 070 10101
|
Tribunal financier Antananarivo
|
56 200 000
|
70 340 000
|
81 119 000
|
207 659 000
|
00 16 1 070 20101
|
Tribunal financier Antsiranana
|
57 074 000
|
71 384 000
|
82 414 000
|
210 872 000
|
00 16 1 070 30101
|
Tribunal financier Fianarantsoa
|
54 297 000
|
67 914 000
|
78 402 000
|
200 613 000
|
00 16 1 070 40101
|
Tribunal financier Mahajanga
|
50 562 000
|
63 248 000
|
73 005 000
|
186 815 000
|
00 16 1 070 50101
|
Tribunal financier Toamasina
|
54 700 000
|
68 417 000
|
78 984 000
|
202 101 000
|
00 16 1 070 60101
|
Tribunal financier Toliara
|
50 300 000
|
62 921 000
|
72 626 000
|
185 847 000
|
Il convient de noter que dans l’attente de la loi de règlement pour 2022, les prévisions 2023 reprennent les prévisions 2022.
Le plan stratégique 2020-2024 de la Cour des Comptes fait notamment ressortir cette insuffisance de budget destiné aux missions juridictionnelles et non-juridictionnelles, et par voie de conséquences, de magistrats recrutés pour chaque résultat stratégique attendu[48]. Plus que l’insuffisance de magistrats, ce plan met le point sur l’insuffisance de ressources humaines afin de contribuer à la mise en place de l’autonomie fonctionnelle, administrative et financière de l’Institut Supérieur de Contrôle[49].
Pour pallier les problématiques posées par l’indépendance de l’Institut Supérieur de Contrôle, des réformes ont été envisagées en vue d’une refonte et d’un nouveau positionnement de la Cour des Comptes. Ainsi, la Cour des Comptes a initié des avant-projets de textes en 2015 et 2016, le Ministère de la Justice en 2017, et la Cour Suprême elle-même en 2020. Ces avant-projets de textes ont pour principal objet de « renforcer l’indépendance institutionnelle, fonctionnelle (administrative et financière) de la Cour des Comptes »[50]. Par ailleurs, le gouvernement a fait de l’indépendance financière de la Cour des Comptes une priorité stratégique dans son programme :
L’Initiative Émergence de Madagascar accordera une priorité à l’indépendance financière de la Cour des Comptes. Le renforcement des moyens de cette juridiction dont la mission porte à la fois sur les services, organismes et entreprises directement contrôlés par elle et sur les collectivités territoriales, les établissements, les sociétés d’État, les groupements et organismes qui relèvent de la compétence des Tribunaux Financiers. Les six Tribunaux Financiers seront, aussi, logiquement, dotés matériellement et en moyens humains afin qu’ils puissent effectuer avec professionnalisme les contrôles juridictionnels des comptes des comptables publics, les contrôles de la gestion des communes et les contrôles thématiques, particulièrement de la dette publique et des marchés publics[51].
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Toutefois, bien qu’en état d’avancement, ces projets de réformes n’ont pas encore été adoptés à ce jour. En effet, la principale difficulté relève du fait que, pour initier une refonte de la Cour des Comptes et revoir son positionnement par rapport à la Cour Suprême, il est nécessaire de procéder à une révision constitutionnelle, la composition de la Cour Suprême étant fixée originairement par la Constitution.
Enfin, dans un souci de mettre en œuvre la décentralisation,[52] six tribunaux financiers –pour les six chefs-lieux de province– ont été créés par la loi n°2001-025 du 21 décembre 2001[53]. Leur création devrait procéder à la suppression de la tutelle administrative et financière exercée par l’État sur les collectivités décentralisées,[54] et alléger le contrôle par la Cour des Comptes de l’utilisation des deniers publics. Tout comme la Cour des Comptes, les tribunaux financiers disposent de compétences juridictionnelles et non-juridictionnelles.[55] La mise en place de tribunaux financiers ou chambres régionales/territoriales des comptes n’est pas typique des pays en développement, mais certainement un facteur de mise en œuvre de la décentralisation.[56] Toutefois, à l’heure actuelle, il n’existe qu’une voie principale d’accès direct au métier de magistrat financier : la voie du concours qui se tient à Antananarivo – l’oral comme l’écrit -, ce qui pourrait être un facteur limitant pour la représentativité des collectivités au sein de la magistrature. Cependant, dans la pratique, les postes par voie de nomination prennent régulièrement en compte ces considérations pour des questions d’équilibre et de représentativité.
Si la fonction traditionnelle d’une juridiction financière est de juger les comptes publics, la fonction d’assistance aux pouvoirs publics prend une place considérable dans les attributions actuelles de la Cour des Comptes et des tribunaux financiers (II).
II. Évolution récente des missions de la Cour des Comptes
Si la compétence première de la Cour des Comptes est le jugement des comptes des comptables publics (A), la mission d’évaluation des politiques publiques prend aujourd’hui une place considérable avec le développement des missions d’audit (B).
A. L’évolution de la fonction de juge de l’exactitude des comptes des juridictions financières
L’article 128 de la Constitution définit la fonction principale de la Cour des Comptes. De manière classique, la fonction première de la haute juridiction financière reste celle de juge des comptes des comptables publics. Cette fonction est rappelée par l’article 276 de la loi organique n°2004-04. Les textes constitutionnels et légaux reprennent ainsi la compétence traditionnelle de la Cour des Comptes et des tribunaux financiers qui est celle d’apprécier la régularité des comptes des comptables publics, et le cas échéant de sanctionner le comptable public.
En effet, le comptable public supporte une responsabilité personnelle et pécuniaire à raison des irrégularités entachant sa comptabilité. C’est ce que prévoit l’article 5 de l’ordonnance 62-081 du 29 septembre 1962 relative au statut des comptables publics lorsqu’il dispose que « sauf en cas de force majeure, tout comptable public est personnellement et pécuniairement responsable : de la justification de ses opérations, ainsi que de l’exacte concordance entre les résultats de ses opérations et la position de ses comptes de disponibilités ; de la conversation des fonds et valeurs dont il a la garde, de la position des comptes externes de disponibilités qu’il surveille ou dont il ordonne les mouvements, de l’encaissement régulier des recettes dont le recouvrement lui est confié, de la régularité des dépenses qu’il décrit ainsi que de l’exécution des dépenses qu’il est tenu de faire »[57]. L’article 13.b de du décret n°2005-003 du 4 janvier 2005 vient compléter ce régime de responsabilité en disposant que « les comptables sont tenus d’exercer : en matière de dépenses, le contrôle (…) de l’application des lois et règlements concernant la dépense considérée ».
Le Tribunal financier d’Antananarivo a notamment engagé la responsabilité personnelle et pécuniaire d’un comptable public au sein de la Commune Urbaine d’Arivonimamo dans un jugement définitif de débet récent du 9 mai 2023 à l’encontre du comptable public en raison du paiement irrégulier de remises[58]. Il a sanctionné également un trop-perçu d’indemnité de responsabilité au profit du régisseur des recettes dans la région de Bongolava situé dans la province d’Antananarivo. Il a sanctionné un défaut de respect de la procédure de passation de marché public dans la Commune Urbaine de Toamasina. Si les tribunaux financiers ont eu à connaître de nombreux cas d’espèces, la Cour des Comptes, en 2022, recense plusieurs points de contrôles regroupés en deux principales catégories : le défaut d’application des lois et règlements d’une part, et le défaut de validité de la créance d’autre part[61]. La Cour des comptes recense principalement sept cas d’espèces pour les sept points de contrôle prévus par le décret n°2005-003 du 4 janvier 2005 à titre d’illustration. Toutefois, elle ne publie pas dans son rapport les statistiques sur le nombre d’affaires que les juridictions financières ont eu à connaître. Il est alors difficile de connaître de la teneur de son activité juridictionnelle.
Cependant, la place que prend l’activité juridictionnelle dans le rapport de la Cour des Comptes soulève quelques questions sur la fonction principale que la juridiction financière assure aujourd’hui. En effet, bien avant son rôle, pourtant traditionnel, de juge des comptes publics, elle met en avant ses activités d’audit, d’assistance aux pouvoirs publics, de contrôle des services publics locaux pour la redevabilité locale[62]. À la lecture des rapports publics de la Cour, l’exercice de sa mission juridictionnelle semble être périphérique.
En effet, plus que le contrôle de la régularité des comptes, elle met en avant sa mission de contrôle de l’exécution des lois de finances telle que prévue par aux articles 93 et 128 de la Constitution, et à l’article 62 de la loi organique n°2004-007 du 26 juillet 2004, la mission de juge des comptes des comptables de l’État n’étant citée qu’en fin de rapport d’activités. Ainsi, dans le cadre de sa mission de contrôle de l’exécution de la loi de finances, elle ne se limite pas à constater la production du projet de loi de règlement. Elle procède à une étude comparative du délai de production du projet de loi de règlement sur plusieurs exercices afin d’alerter les autorités sur les éventuelles défaillances au niveau du système. C’est notamment le cas depuis 2017 avec une détérioration du délai de dépôt légal à la Cour du projet[63].
Outre les délais légaux, elle observe notamment les efforts déployés et manquements constatés, les insuffisances dans la comptabilisation des opérations, les déficits et affectations erronées de comptes par le Ministère des Finances et du Budget. Plus que de constater les efforts et manquements, elle émet des recommandations détaillées au Ministère des Finances et du Budget quant à l’exécution des lois de finances sur la base de ses observations. Le suivi des recommandations démontre toutefois les limites du rôle de la Cour des Comptes, dans la mesure où une grande majorité de ces recommandations ne sont pas suivies par les autorités concernées[64]. Le tableau de suivi des recommandations montre que cinq recommandations sur sept n’ont pas été suivies, pour une suivie et une en cours d’études à la date de publication du rapport.
Enfin, dans le cadre de sa mission d’assistance aux pouvoirs publics suivant l’article 284 de la loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004, la Cour des Comptes fait l’objet de demandes d’avis des Ministères publics[65]. La Cour des Comptes a fait l’objet de six demandes d’avis en 2022. En effet, elle peut être amenée à effectuer des études d’ordre économique et financier ou donner son avis sur des projets de textes relatifs aux finances publiques. Elle a notamment eu à le faire dans un avis n°08/22-ADM/APP/AVIS/ASH du 6 mai 2022 sur les taux d’indemnités des missions des agents de l’Autorité Sanitaire Halieutique. Dans le cas d’espèce, le Ministre de la Pêche et de l’Économie Bleue a saisi la Cour des Comptes, en date du 30 mars 2022, sur l’application d’une délibération du Conseil d’administration de l’autorité qui n’aurait pas été conforme à un décret. La Cour a ainsi rappelé à l’autorité administrative son obligation de se conformer aux textes règlementaires, sans pour autant sanctionner la méconnaissance des textes. On note le délai relativement court de la Cour lorsqu’elle émet des avis aux autorités publiques (un avis émis le 6 mai 2022 pour une saisine le 30 mars 2022). La question du rôle juridictionnel de la Cour se pose à nouveau dans la mesure où, bien qu’en présence d’une méconnaissance manifeste des textes, la Cour ne se limite qu’à un rappel de l’obligation de respecter le droit positif sans en sanctionner la méconnaissance.
Si la Cour des Comptes a eu à s’intéresser aux collectivités territoriales décentralisées, le premier acteur juridictionnel de celles-ci reste les tribunaux financiers territoriaux compétents pour chaque province. Non-prévus par les textes constitutionnels, les tribunaux financiers n’en sont pas moins des plus importants et nécessaires en vue d’assurer l’effectivité de la décentralisation telle que prévue par la Constitution. En effet, juge en premier ressort des comptes des comptables publics des collectivités territoriales décentralisées et des établissements ou organismes publics y rattachés, les tribunaux financiers ont régulièrement à connaître de la régularité des comptes de ces collectivités[66].
Ainsi, en 2022, le Tribunal financier d’Antananarivo a eu à connaître d’une requête en révision du jugement de débet à son encontre jugement en date du 22 août 2012[67]. En effet, le débiteur de la Commune Urbaine d’Antananarivo fait l’objet d’un jugement de débet pour des faits de gestion datant de 2006. Dans une décision du 15 juin 2022, le Tribunal financier d’Antananarivo décide de l’irrecevabilité de la requête en révision formée par la débitrice et rejette ainsi sa demande[68]. Plus que la requête en révision en elle-même, les questions des délais de traitement des affaires se posent lorsqu’en 2022, les tribunaux ont à connaître d’affaires de gestion de la Commune datant de 2006. On observe toutefois des traitements plus rapides avec le jugement en 2023 d’une gestion en 2019. Ces délais seraient dus au manque de ressources humaines des tribunaux financiers[71] tel que mis en avant par la Cour des Comptes tout au long du plan stratégique 2020-2024 qu’elle a présenté[72]. En effet, le rapport de la Cour des Comptes fait état d’un Président à sa tête, quatre conseillers, un commissaire financier et deux substituts, ce qui est insuffisant pour connaître de toutes les affaires relevant du Tribunal financier d’Antananarivo (de la province d’Antananarivo). Les chiffres sont sensiblement similaires pour les cinq autres tribunaux financiers composant les juridictions financières du premier degré.
Outre le manque de ressources humaines, les tribunaux financiers assurent d’autres missions, et notamment celle de contrôle de l’exécution du budget, des comptes et de la gestion des collectivités, et des actes budgétaires de celles-ci[73]. Ces missions prennent alors le pas sur les activités de jugement des comptes. Par exemple, dans le cadre de sa mission de contrôle de l’exécution du budget, le tribunal financier d’Antananarivo a procédé au contrôle des achats publics et de la gestion du patrimoine de la Commune Rurale d’Ambatomirahavavy. Ce contrôle recouvre notamment les commandes publiques et la comptabilité administrative, des matières et des travaux. Les juges financiers émettent notamment des recommandations sur la gestion financière et administrative des achats et du patrimoine au sein de la Commune[74]. C’est également le cas du Tribunal financier de Toliara qui a statué sur la requête du Chef de district de Tsihombe, représentant de l’État central au sein du district, qui a saisi le Tribunal suite à l’absence d’adoption du budget dans le délai légal pour défaut de l’organe délibérant de la Commune[75]. Il faut noter que les délais de traitement des avis des juridictions financières sont raisonnables si on procède à une comparaison avec le traitement des activités juridictionnelles de la Cour. Le Tribunal financier de Toliara a rendu son avis le 20 mai 2022 pour une saisine le 15 mars 2022, enregistrée à la Cour le 18 mai 2022[76].
Dans la pratique, les contraintes opérationnelles sont telles que le juge financier exerce alors davantage une mission de conseil et d’assistance, que juridictionnelle et contentieuse. En effet, les tribunaux financiers exercent une mission d’assistance aux pouvoirs publics en permettant aux autorités des collectivités ainsi qu’au Délégué général du gouvernement dans la province de consulter le tribunal financier compétent sur tout projet de texte d’ordre budgétaire, financier ou comptable concernant lesdites collectivités. Cette mission prend également le pas sur la fonction juridictionnelle, fonction première des tribunaux financiers. Elle recouvre un périmètre large dans la mesure où les autorités locales ont pu bénéficier de formation et sensibilisation en matière de bonne gouvernance par le Tribunal financier de Fianarantsoa en juillet 2022[78]. C’est également le cas du Tribunal financier de Mahajanga qui a effectué respectivement une mission de sensibilisation auprès des régions Betsiboaka et Sofia sur la gestion des ressources propres des collectivités territoriales décentralisées[79]. Plus que d’assistance aux pouvoirs publics, les tribunaux exercent ainsi un véritable rôle d’accompagnement des autorités locales dans le cadre de la mise en œuvre effective de la politique de décentralisation[80].
B. Le développement des missions d’audit exercées par les juridictions financières
L’activité d’audit revêt une importance particulière puisqu’elle est mise en avant dans le rapport de la Cour des Comptes[81]. En effet, la Cour des comptes fait état de plus de trente-trois audits thématiques produits – audit de conformité et de performance, de dix rapports d’évaluation des politiques publics, et quatre rapports d’expertise, et les Tribunaux financiers ont produit plus de quarante-cinq rapports d’audit thématiques[82]. Cela témoigne de l’ampleur de la fonction de contrôle des activités et d’assistance aux pouvoirs publics qu’ont les juridictions financières aujourd’hui.
La notion d’audit, qui concerne trois indicateurs PEFA sur quatre, n’a pas en l’état de nos connaissances, d’ancrage légal. Le terme est inexistant dans la loi n° 2004-036 du 1er octobre 2004, texte de référence pour les attributions de la Cour des Comptes. Même remarque pour la loi n° 2001- 025 du 9 avril 2003 modifiée relative au tribunal administratif et au tribunal financier. Idem concernant la loi organique n°2004 – 007 du 26 juillet 2004 sur les lois de Finances. Ces textes s’appliquent à ce que la Cour des Comptes considère comme sa « mission classique », c’est-à-dire le contrôle des comptes des comptables publics[83]. L’issue de ce contrôle est la mise en cause de la responsabilité des comptables publics[84]. Au contraire, l’audit n’a aucune portée juridictionnelle. Elle est « en lien avec la stratégie économique de l’État »[85]. Faute de pouvoir s’appuyer sur des textes explicites, la Cour des Comptes énonce ses propres définitions de ses audits.
Selon le rapport public 2022, « l’audit de conformité a pour objectif global d’évaluer le respect des dispositions légales et règlementaires, ainsi que les clauses conventionnelles de la gestion des services publics locaux. L’audit de performance contribue à vérifier le fonctionnement effectif de la structure organisationnelle du service public local au regard des objectifs qui lui sont assignés »[86]. Elle en précise les méthodes dans les rapports thématiques : « Ce sera un contrôle utilisant comme méthode l’audit de conformité. Toutefois, des principes de l’audit de performance, selon les normes International Standards of the Supreme Audit Institutions seront aussi utilisés selon les besoins du contrôle »[87].
L’audit semble recouvrir extensivement toutes les missions qui ne relèvent pas du contrôle juridictionnel des comptes. Ainsi dans le rapport PEFA 2021, la Cour des Comptes constate qu’elle « n’a pas les moyens de remplir ses obligations en matière d’audit des états financiers dans les délais requis en raison de la transmission tardive des comptes pour jugement, Elle reçoit les projets de loi de règlement très tardivement, toujours plus d’un an après la fin de l’exercice. Ainsi, il lui aura fallu patienter plus d’un an et demi avant de recevoir le projet de loi de règlement de 2018[88]. Ce retard est incontestablement une violation de l’article 377 de la loi n° 2004-036 du 1er octobre 2004. Mais il ne s’agit en aucun cas d’un audit. Selon l’article 378 de la même loi, la Cour des Comptes rend un rapport sur le projet de loi de règlement et délibère une déclaration générale de conformité entre les écritures des ordonnateurs et celles des comptables de l'État[89]. Faute de quoi, la loi de règlement ne saurait être adoptée.
En dépit de la forte attraction qu’il exerce dans le domaine du contrôle de gestion axée sur les résultats, au niveau international comme au niveau interne, il conviendrait de ne pas employer le terme d’audit dans le cadre des procédures constitutionnelles et des procédures juridictionnelles. L’audit tel qu’il apparaît dans les documents examinés se borne aux missions pour lesquelles la constitution ou la loi n’a pas prévu de suites juridiques, laissant aux autorités politiques à leurs responsabilités.
La Cour des comptes procède à une évaluation des politiques publiques en choisissant apparemment de manière autonome et sans consultation des autorités concernées, un secteur particulier, qu’elle justifie le plus souvent, par l’impact que ce secteur a sur le niveau de vie de la population :
Mandat de la Cour des Comptes. Face à cette situation et consciente du rôle qu'elle joue dans la surveillance du circuit de production et de commercialisation de l'or, en un mot de la traçabilité des opérations d’exploitation de l’or, la Cour des Comptes en tant qu’Institution Supérieure de Contrôle des finances publiques a effectué un contrôle de la gestion des exploitations aurifères. En effet, son mandat est suffisamment large, de par la Constitution et la Loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004 relative à l’organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois cours la composant. Il s’agit du contrôle du secteur minier à travers celui de l’administration minière et des Collectivités Territoriales Décentralisées (CTD) dont l’objectif est d’apporter de la valeur ajoutée dans la gestion du secteur et partant, dans la vie de la population. Ce sera un contrôle utilisant comme méthode l’audit de conformité. Toutefois, des principes de l’audit de performance, selon les normes ISSAI, seront aussi utilisés selon les besoins du contrôle[90].
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En 2021, la Cour des Comptes a audité l’Autorité de Régulation des Technologies de la Communication (ARTEC) en indiquant la nécessité de développer les réseaux et services de télécommunication et favoriser l’accès à des services de qualité à un prix accessible pour les citoyens. En 2022, lorsqu’elle procède à l’évaluation de la politique et stratégie nationale d’assainissement à Madagascar pour la période de 2008 à 2015, elle justifie son choix en se basant sur l’Indice de Développement Humain à Madagascar en 2019, et la place de Madagascar dans le classement mondial en matière d’accès aux installations d’assainissement élémentaires, et l’impact socio-sanitaire, économique et environnemental d’une amélioration des politiques publiques en la matière.
Dans le cadre de sa mission de contrôle de la gestion des entreprises publiques, la Cour des Comptes a procédé à un audit du secteur extractif, et notamment le suivi des activités de production et de commercialisation de l’or de 2018 à 2021[92]. Il faut noter que cette activité d’audit menée par la Cour des Comptes en 2022 est présentée en première partie dans son rapport public. Cela montre l’importance que la Cour, ainsi que les politiques publiques de manière générale, accorde à ce secteur. En effet, rien que pour l’année 2018, une vingtaine de communes et deux Régions (Alaotra Mangoro et Atsinanana) ont reçu environ 55 milliards d’Ariary de ristournes minières issues d’un des plus grands projets miniers du pays, le projet Ambatovy (Données issues de la Trésorerie Générale de Toamasina, Ristournes minières Ambatovy Minerals)). La Cour des Comptes a procédé en 2022 au contrôle de suivi des activités de production et de commercialisation de l’or dans six collectivités décentralisées – en l’occurrence six Communes de la Région du Betsiboka. Pour s’assurer des retombées économiques sur les entités décentralisées, elle a notamment procédé à un audit de « l’utilisation des ristournes minières perçues par certaines collectivités territoriales décentralisées à des fins de développement durable et inclusif » pour la période de 2018 à 2021[93]. De plus, l’audit du secteur de l’or concerne une période récente, et a été mené dans un délai très court si on compare ce délai avec le traitement des affaires juridictionnelles[94].
Si la Constitution assigne à la Cour des Comptes une mission de contrôle de l’exécution des lois de finances et des budgets des organismes publics, de contrôle des comptes et de la gestion des entreprises publiques, et d’assistance au Parlement et au Gouvernement dans le contrôle de l’exécution des lois de finances, sa fonction première telle qu’écrite dans la loi fondamentale reste le jugement des comptes des comptables publics. La fonction traditionnelle de juge des comptes passe au second plan quand l’assistance aux pouvoirs publics, et de manière générale, l’évaluation des politiques publiques, prend une place prépondérante dans les activités des juridictions financières.
III. Dynamique de performances relative à la Cour des Comptes
La performance de l’Institution Supérieure de Contrôle malgache dans l’exercice des missions qui lui sont confiées est obérée par une pluralité d’indicateurs de performance (A) et par l’utilisation massive de la recommandation alors qu’il faudrait réprimer les infractions (B).
A. Une pluralité d’indicateurs de performance
La très grande proximité des règlementations comptables malgache et française, conséquence d’une sphère d’influence historique, s’est traduit par un contrôle juridictionnel assez éloigné de la performance de la gestion publique. Les juridictions financières se bornent à des contrôles de régularité et d’exactitude. Elles n’exercent aucun contrôle d’opportunité. Le bon emploi des fonds publics reste de la compétence exclusive des gestionnaires publics. En France, la performance est apparue seulement en 2001, avec l’adoption de la loi organique relative aux lois de finances. Elle n’a pas modifié les compétences du juge financier sauf en ce qui concerne la certification du Compte général de l’État. Le programme n° 164, consacré à la Cour des comptes et autres juridictions financières françaises, repose sur les seuls indicateurs suivants :
Objectif 1 Garantir la qualité des comptes
Indicateur 1.1 Part contrôlée des comptes tenus par les comptables publics (en masse financière)
Indicateur 1.2 Effets sur les comptes des travaux de certification
Objectif 2 Contribuer à l’amélioration de la gestion publique et des politiques publiques
Indicateur 2.1 Suites données aux recommandations de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes
Indicateur 2.2 Délai des travaux d’examen de la gestion
Objectif 3 Assister les pouvoirs publics
Indicateur 3.1 Réalisation des travaux demandés par les pouvoirs publics dans les délais
Indicateur 3.2 Nombre d’audition au parlement
Objectif 4 informer les citoyens
Indicateur 4.1 Nombre de retombées presse
Indicateur 4.2 Fréquentation du site internet des juridictions financières
Objectif 5 Sanctionner les irrégularités et la mauvaise gestion
Indicateur 5.1 Délais de jugement[95]
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À Madagascar, la notion de performance est absente de la loi organique n°2004 – 007 du 26 juillet 2004 sur les lois de Finances. Deux mentions seulement dans les motifs, ne sont pas reprises dans le dispositif de la loi. La Cour des Comptes a été chargée d’apprécier « la performance des services publics » avec la loi de 2004 sur les attributions, notamment, de la Cour des Comptes[96]. Elle peut également « procéder au contrôle de performance des entreprises publiques par secteur économique »[97]. Cette rédaction est probablement trop extensive. Du fait de l’intervention d’une pluralité d’entités internationales à côté des autorités nationale, les indicateurs de performances ne sont pas unifiés. Le Plan stratégique 2020-2024 de la Cour des Comptes repose sur trois résultats stratégiques qui se déclinent en objectifs stratégiques et en une multitude d’activités et d’indicateurs[98] :
Résultat stratégique n°1 : L’ISC contribue à la promotion de l’intégrité, de la redevabilité et de la transparence des organismes publics en corrélation avec les priorités de l’Etat
Résultat stratégique n°2 : Les actions de l’ISC sont crédibles, visibles et accessibles au grand public
Résultat stratégique n° 3 : L’ISC promeut la culture de la transparence et de la performance pour devenir une institution modèle
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Ces résultats stratégiques ne correspondent pas aux indicateurs de performance relatifs à la Cour des Comptes figurant dans les lois de finances :
Rapport annuel de performances 2020 (extrait)
Ministère – Mission – Programme -Objectif global-Objectif spécifique - Résultats
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Unités
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Valeurs cibles
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Valeurs réalisées
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Écarts
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Évaluation
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Initiales
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Finales
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132 Contrôle externe des finances publiques
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132.1 promouvoir la régularité la performance la transparence dans la gestion des finances publiques
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132.1.1 S’assurer de la régularité des comptes publics à travers les missions juridictionnelles
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132.1.1.1 moyens matériels de la juridiction financière renforcés
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132.1.1.1.R1 % des bureaux des juridictions financières disposant des matériels et mobiliers respectant les normes minimales
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%
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70
|
70
|
0
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-70
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NA
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132.1.1.2 Contrôle juridictionnel systématique et à jour
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132.1.1.2.R1 nombre d’arrêts et jugements définitifs sortis par les juridictions
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Nb
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85
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85
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134
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49
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A
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132.1.1.3 Contrôle systématique et à jour de l’exécution des lois de finances
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132.1.1.3.R1 Taux d’avancement annuel du contrôle du projet de loi de règlement
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%
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100
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100
|
100
|
0
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A
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132.1.2 Contribuer à l’amélioration de la performance des services publics (établissements et entreprises publiques, collectivités locales)
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132.1.2.1 contrôle plus accru de la gestion des services publics
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132.1.2.1.R1 nombre d’organismes audités
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Nb
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10
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10
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6
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-4
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NA
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132.1.4 Cadrer et renforcer les relations avec les pouvoirs publics (gouvernement, parlement, pouvoirs au niveau des collectivités décentralisées)
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132.1.4.1 Cour des comptes et tribunaux sollicités davantage par les pouvoirs publics en matière d’assistance
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132.1.4.1.R1 nombre d’activité d’assistance effectuées au gouvernement, parlement, pouvoirs publics centralisés.
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Nb
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3
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3
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1
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-2
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NA
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Ce tableau ne tient pas compte des missions périphériques suivantes qui sont aussi des indicateurs de performance : régularité et transparence des campagnes électorales, information des citoyens sur la situation des finances publiques, la commission du contrôle de financement de la vie politique, la tenue des comptes de campagne et les activités organisées au niveau des instances internationales. À ces deux grilles d’évaluation, s’ajoute les 31 indicateurs PEFA, le pilier VII sur le contrôle des comptes publics comportant les quatre indicateurs suivants [100].
Indicateurs/composantes :
30.1 Portée de l’audit et normes de l’audit
30.2 Soumission des rapports d’audit au pouvoir législatif
30.3 Suite donnée aux audits externes
30.4 Indépendance de l’institution supérieure de contrôle (ISC)[101]
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Sur cette base, la notation PEFA entre 2018 et 2021 s’est dégradée, passant de C à D. Les points positifs existent cependant. Le rapport PEFA 2008 notait qu’il « n’existe pas de rapport public de la Cour des comptes »[102]. Ce n’est plus le cas. Les rapports annuels sont disponibles et mis en ligne depuis 2014. On note que les arrêts et avis de la Cour sont toujours en « attente de mise à jour » sur le site internet de la juridiction.
B. L’utilisation extensive des recommandations
Les juridictions financières sont chargées d’évaluer les performances des politiques publiques. Le détail de ces interventions sur une masse budgétaire dont les derniers chiffres disponibles sont ceux de 2020, avec un total général de 11 079 242 457 020.10 et un déficit de 1 273 510 850 263.54, soit un peu plus de 2 260 millions d’euros avec un déficit de 259 millions d’euros, dépasse le cadre de cette étude. En effet, l’audit de performance 2020 sur l’état de préparation à la mise en œuvre des objectifs de développement durable à Madagascar, fait état des 521 indicateurs du Système National Intégré de Suivi-Evaluation (SNISE) mis en place depuis 2088[104]. La prolifération des indicateurs est certainement une cause des difficultés que rencontre l’Institution supérieure de contrôle. Cela étant, la Cour des Comptes utilise les recommandations fondées sur les articles 289 et 424 de la loi de 2004.
Les recommandations émises par la Cour vont de la cohérence de la politique à sa mise en œuvre, en passant par le rappel des bonnes pratiques dans le secteur défini. Dans le cadre de l’audit du secteur extractif en 2022, elle a recommandé aux autorités publiques de mettre en place des structures de concertation locale en mettant en avant une approche participative et inclusive des citoyens. Allant au-delà de l'évaluation des procédures en place, elle définit des objectifs spécifiques pour que les collectivités concernées par l’extraction minière puissent bénéficier des retombées socio-économiques de celle-ci. Ce rôle de conseil ne relève pas de sa compétence juridictionnelle et fait de la Cour des Comptes un acteur de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques publiques, ce qui n’est, toutefois, pas son rôle.
L'extrait suivant du rapport public 2022 montre combien les recommandations sont utilisées extensivement :
Pour la performance Il est recommandé :
? au Ministère de l’Énergie, de l’Eau et de l’hydrocarbure de :
- faire preuve de rigueur dans la détermination des indicateurs de performance (indicateurs de résultats, valeur cible)
- communiquer plus d’informations sur la performance
- multiplier les efforts pour améliorer le secteur de l’énergie rechercher les ressources alternatives en matière d’énergie
? au Ministère des Travaux Publics de :
- déployer plus d’effort pour la construction et la réhabilitation des routes tout en assurant leur financement qui devrait être au moins 2% du PIB.
- D’améliorer la qualité des informations sur la performance.
- Ainsi la Cour recommande au Ministère de l’Agriculture le rendement agricole « tonne par hectare » (t/ha) comme indicateur.
? au Ministère de l’Éducation Nationale de :
- veiller à l’amélioration de la qualité des informations sur la performance[105].
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Si les audits et contrôles effectués par la Cour des Comptes complètent utilement l’activité juridictionnelle, ils ne sauraient s’y substituer. Or, si l’on s’en tient au dernier rapport public de 2022, de nombreuses recommandations adressées aux autorités nationale ou locale visent en réalité des infractions.
Le droit malgache dispose de toutes les ressources nécessaires pour la mise en cause des responsabilités. Dans les cas les plus graves, la responsabilité est engagée par l’intermédiaire du Procureur auprès des juridictions répressives : « Le Commissaire Général du Trésor Public saisit la Cour et s'il y a lieu, les juridictions répressives par l'intermédiaire du Procureur Général près la Cour Suprême, de toutes, opérations financières irrégulières effectuées par un comptable patent ou de fait »[106].
La responsabilité de droit commun est inhérente aux procédures comptables : « Responsabilité des ordonnateurs et des comptables publics. La violation des règles de gestion budgétaire et financière par les personnes qui sont appelées à exécuter les recettes et les dépenses du budget de l'État, des collectivités publiques ou des établissements publics les rend passibles du Conseil de Discipline Budgétaire et Financière dont la compétence, l'organisation et le fonctionnement sont fixées par la loi. Pour leur part, les comptables publics sont soumis à un régime de responsabilité pécuniaire et personnelle à raison des irrégularités ou manquements commis dans l'exercice de leurs fonctions, indépendamment des responsabilités de droit commun, disciplinaires, civiles et pénales qu'ils encourent en ces occasions »[107].
La mise en œuvre effective de ces responsabilités ne ressort pas clairement des rapports publics. La Cour des Comptes, comme les six Tribunaux font preuve de retenue : Ainsi le Tribunal financier estime que le conseil et les membres de l’exécutif de l’OPCI ont failli à leurs obligations légales et règlementaires en matière d’établissement des documents budgétaires ainsi que les actes subséquents le concernant. À cet effet, le Tribunal préconise à l’OPCI d’établir les documents budgétaires exigés par les lois et les règlements sous peine de sanction à son égard[108]. Cette préconisation appelle trois observations. Tout d’abord, en matière budgétaire et comptable, le contrôle des juridictions financières est systématique, objectif et d’ordre public. Le défaut de production des documents constitue en soi l’infraction sans circonstances atténuantes. Ensuite, et par voie de conséquences, la Cour n’est pas juge de l’opportunité des poursuites qui doivent être engagées en tout état de cause. Enfin, les sanctions ne sont pas prises à l’égard de l’OPCI en tant que personne morale, mais à l’égard de l’ordonnateur et du comptable. Aussi, la tonalité de la préconisation ne paraît pas conforme aux obligations résultant des textes.
Dans le même ordre d’idées, au niveau national cette fois-ci, quand la Cour recommande au Gouvernement de se conformer aux dispositions légales et règlementaires régissant les modes de gestion des services publics, il faut en déduire qu’il s’en affranchit[109]. C’est précisément l’infraction visée par l’article 56 de la loi organique n°2004 – 007 du 26 juillet 2004 sur la mise en cause de la responsabilité des ordonnateurs et des comptables. La mansuétude de la Cour s’exprime aussi quand elle recommande de « saisir le comité d’éthique des marchés publics au niveau de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics pour la prise de mesures à l’encontre des titulaires de marchés défaillants »[110]. Mais là encore, la loi n° 2016-055 portant Code des Marchés Publics prévoit une procédure de mise aux frais pour les entreprises défaillantes et nullement la saisine d’un comité d’éthique[111]. Il est certain qu’en règle générale, le défaut ou les retards de paiement des entreprises ayant répondu à des marchés publics entraîne de nombreux désordres dans la gestion de la commande publique. Cela explique la multiplication des avenants, la non-participation des meilleures entreprises aux appels d’offres et la mauvaise qualité des prestations. Les juridictions financières peuvent contribuer à améliorer cette situation en utilisant les voies de droit adéquates. Or, dans les détails de la jurisprudence, la même retenue se manifeste.
Le Tribunal financier d’Antananarivo a rendu le 13 décembre 2019, un avis de rejet d’inscription au budget de la Capitale de Madagascar, d’une dépense obligatoire relative à des marchés publics prétendument impayé[112]. Deux observations s’imposent. La première, c’est que les marchés en question concernent les exercices budgétaires 2007 et 2008, soit onze ans entre les faits et la saisine du Tribunal. La seconde, c’est que la saisine a été effectuée par le Préfet de Police de la ville d’Antananarivo aux fins d’avis sur le caractère obligatoire de la dépense, le 15 novembre 2019. Il se sera écoulé moins d’un mois entre la saisine et l’avis, dans le respect rigoureux de l’article 168 de la loi modifiée n°2001-025 du 09 avril 2003 relative au Tribunal administratif et au Tribunal financier. Celui-ci a considéré que les pièces fournies par le Préfet de police à l’appui de la saisine étaient insuffisantes et que les montants étaient discordants, ce qui a permis de statuer négativement sur la demande. La Ville elle-même n’avait pas conservé les pièces soi-disant relatives à ces marchés. Aux termes de l’article 52 du décret n° 2005-003 portant règlement général sur la comptabilité de l’exécution budgétaire des organismes publics, les pièces justificatives étaient disponibles auprès du comptable public. Mais la motivation de l’avis du 13 décembre aurait gagné à rappeler que les dépenses publiques sont prescrites dans un délai de quatre années[113]. Le Tribunal n’avait pas à statuer parce que la prétendue créance était éteinte depuis 2013. Ainsi, a été manqué une occasion de rappeler aux entreprises créancières de l’État ou des collectivités territoriales, la rigueur des délais de prescriptions en vue de l’accélération de l’apurement des comptabilités.
Au niveau local, la tâche des Tribunaux financiers est rendue difficile tant les infractions financière et comptable sont nombreuses. Le Tribunal recommande « à l’ordonnateur de la Commune urbaine de Mahabo de respecter les affectations des subventions prévues par les lois et règlements en vigueur »[114]. La recommandation est faite dans le cadre d’un audit. Mais la suivante émane d’un contrôle ce qui semble ne rien changer : Le Tribunal recommande « pour les travaux, de respecter les procédures préconisées par les lois et les règlements sur les marchés publics en l’occurrence le respect des procédures applicables selon les seuils en vigueur »[115]. Ainsi, audit et contrôle se confondent dans une absence d’effet autre que la « recommandation » ou la « préconisation » qui ne sont ni à la hauteur des infractions constatées, ni conformes à la législation. S’il ne faut pas exclure l’hypothèse de poursuites ultérieures qui n’apparaîtraient pas dans les rapports publics, l’utilisation des « recommandations » demeure en tout état de cause, juridiquement discutable.
Dans le cadre du contrôle des comptes, les juridictions financières qui n’hésitent pas à constater des débets, restent sur la réserve, adressant au comptable une sorte « d’injonction » dont le fondement légal n’est pas évident. Ainsi, dans un arrêt du 9 mai 2023, alors qu’il est question de marchés publics, le Tribunal « enjoint pour l’avenir au comptable en poste de s’assurer du respect de l’application des lois et règlements en matière de marché public ainsi que de la nomenclature des pièces justificatives requises »[116]. La motivation de cette injonction laisse perplexe : « Attendu que suivant l’article 13-b du décret n°2005-003 du 04 janvier 2005 portant règlement général sur la comptabilité de l’exécution budgétaire des organismes publics, le comptable est chargé du contrôle de l’application des lois et règlements concernant la dépense considérée »[117].
Article 13 b – en matière de dépenses, le comptable exerce le contrôle[118] :
− de la qualité de l’ordonnateur ou de son délégué ;
− de l’application des lois et règlements concernant la dépense considérée ;
− de la validité de la créance dans les conditions prévues à l’article 15 ci-après ;
− le cas échéant, de la disponibilité des fonds ou valeurs ;
− de la disponibilité des crédits ;
− de l’imputation de la dépense au chapitre qu’elle concerne selon sa nature ou son objet ;
− de la validité de la quittance ;
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Toute carence dans l’exercice de ces contrôles engage la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable. L’injonction n’a aucune place dans cette procédure.
Les juridictions financières interviennent aussi vigoureusement pour protéger le principe de séparation des ordonnateurs et des comptables. Par exemple, un jugement du 23 novembre 2022 du Tribunal Financier Antananarivo a condamné quatre personnes dont le maire, ordonnateur principal, de la commune d’Antsirabe, à l’amende prévue par l’article 188 de la loi modifiée n°2001-025 du 09 avril 2003 pour immixtion dans les fonctions du comptable public[119]. Cette fermeté tranche avec une autre préconisation dans le rapport public 2022 : « Il est également préconisé à la Commune de respecter les attributions du Trésorier Communal qui ne devrait intervenir que dans la phase comptable conformément à l’article 8 de l’arrêté n°21 149/2016/MFB/SG/DCP/SSEPC du 13 octobre 2016 »[120].
Les juridictions financières malgaches ont certainement leur place dans le contrôle des performances des administrations publiques et les missions d’audit. Encore faudrait-il réserver celles-ci aux principaux enjeux financiers qui engagent la soutenabilité économique et financière du pays. Le reste, c’est-à-dire le quotidien des opérations comptables relève de la mission de contrôle des comptes des comptables publics.
Conclusion
Contrairement à d’autres institutions supérieures de contrôle de même type en Afrique subsaharienne qui ne sont plus en mesure de remplir les missions qui leurs sont confiées du fait de l’ampleur des désordres intérieurs, la Cour des Comptes de Madagascar est opérationnelle et sa production est de qualité.
Il ressort de l’examen de ses activités une triple difficulté. Les moyens matériels et humains ne sont certainement pas à l’échelle d’une Institution Supérieure de Contrôle qui se situe au sommet des institutions du pays. L’activité d’audit, sans doute plus en phase avec l’évaluation des politiques publiques, a fait passer la mission de contrôle des comptes publics au second plan. La mesure de la performance des services centraux ou décentralisés, révèle en pratique des infractions dont le suivi juridictionnel reste douteux.
Ainsi, les autorités politiques malgaches devraient-elles envisager tout d’abord un renforcement des moyens budgétaires de l’institution et éventuellement, un siège qui lui soit propre. Ensuite, il paraît indispensable de fonder les audits sur des dispositions légales qui en délimitent le périmètre et les conséquences. Enfin, le contrôle systématique des comptes publics demeure la mission essentielle à partir de laquelle s’apprécie la gestion des finances publiques par les autorités nationales et internationales. Cette mission devrait selon toute logique, concentrer l’essentiel des moyens disponibles. Elle devrait recevoir le traitement juridictionnel prévu par les textes et non faire l’objet de recommandations ou de préconisations non contraignantes.
Si la Cour des Comptes est largement tributaire de l’organisation administrative globale pour ce qui concerne la production des comptes et même du projet de loi de règlement, il n’appartient qu’à elle d’allouer ses ressources à sa fonction juridictionnelle première et d’appliquer en cas de manquement, les sanctions prévues par la loi. Il en résultera mécaniquement une amélioration de l’évaluation PEFA. Mais dès maintenant, la Cour des Comptes apparaît comme un partenaire fiable des instances nationales et des bailleurs de fonds dans l’évaluation de la performance de la gestion des finances publiques.
[3] Cour des Comptes, Plan stratégique 2020-2024, Antananarivo, 2020, 24 pages.
[4] USAID, Madagascar Country Profile, April 2022, page 2.
[5] USAID-PNUD, Madagascar Governance Strengthening Program Activity Monitoring, Evaluation, & Learning Plan, RINDRA Activity MEL Plan, 5 janvier 2022, 36 pages. 8.
[7] INTOSAI-Cour des Comptes, Rapport définitif n° 10 /20-rod/adm/ODD du 12 octobre 2020 sur l’audit de performance de l’état de préparation à la mise en œuvre des objectifs de développement durable à Madagascar - gestions 2015 à 2018, octobre 2020, page iv.
[9] Décret n° 2010-994 portant promulgation de la Constitution de la Quatrième République, article 128.
[10] Loi organique n°2004 – 007 du 26 juillet 2004 sur les lois de Finances, article 44.
[12] Cour des Comptes, Rapport définitif n°15/22-adm/audit/rod/or du sur le suivi des activités d’orpaillage dans les phases de production et de commercialisation - Cas de six Communes de la région de Betsiboka, 25 octobre 2022, page 2.
[13] Ministère de l’économie et des finances, Rapport 2021 sur la Performance de la Gestion des Finances Publiques à Madagascar sur la période 2018-2020, Antananarivo, 2021, page 91.
[14] C’est notamment le cas pour les pays d’Afrique centrale comme le Cameroun où la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) exige de ses États membres la création d’une Cour des comptes ou au Bénin dans le cadre de l’Union économique et monétaire des pays d’Afrique de l’Ouest (UEMOA). Voir, BILOUNGA C.-T., Les relations entre l’ordonnateur et le comptable à la lumière de la loi du 26 décembre 2007 portant régime financier de l’État au Cameroun , GFP 2017, n°3, page114 ; MEDE N., Réflexions sur l’autorité de la chose jugée au financier en droit positif africain francophone , in Mélanges Lassale, Montagnier, Saïdj, L’Harmattan, 2012, page 276.
[15] Cour Suprême, Jurisprudence de la Chambre des comptes , Recueil n°2, 1965/1977, République démocratique de Madagascar, page 4 et suivantes.
[17] Cette fonction relevait à l’origine du Directeur général des Finances.
[18] Toutefois, les règles de procédure applicables aux nouvelles juridictions n’ont pas été prévues par le texte. Aussi, le législateur a considéré qu’il était nécessaire d’élaborer un texte retraçant l’organisation, la composition, les attributions desdites juridictions, ainsi que les règles de fonctionnement applicable devant la Cour Suprême et les trois cours la composant. Voir notamment le préambule de la loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004.
La loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004 relative à l’organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant vient ainsi corriger cette omission.
[19] Loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004 relative à l’organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant, article 276.
[21] L’article 3 complété par l’article 143 de la Constitution malgache dispose que la décentralisation s’organise en un système de collectivités territoriales composées de communes, régions et provinces. Bien que le préambule de la Constitution précise la nécessité de mettre en œuvre la décentralisation en octroyant aux collectivités décentralisées les compétences nécessaires ainsi que les moyens financiers, les seules entités décentralisées sont les communes et les régions. Les provinces, entités les plus élevées de la décentralisation (article 4 de la loi n°2014-020 relative aux ressources des collectivités territoriales décentralisées, aux modalités d’élections, ainsi qu’à l’organisation, au fonctionnement et aux attributions de leurs organes) ne sont, pour l’heure, pas opérationnelles.
Par ailleurs, au niveau régional, les élections des conseils régionaux n’ont pas eu lieu, les gouverneurs de région ayant été nommés par la voie du décret n°2019-1866 du 25 septembre relatif au Gouverneur adopté en Conseil des ministres. Sur le recul de la décentralisation par la voie de nomination de gouverneurs de région, voir RADILOFE R., Chronique de droit constitutionnel malgache, RJOI 2020, n°29, pages 638 et 639, et RADILOFE R., Chronique de droit administratif malgache, RJOI 2020, n°29, pages 658 et 659.
[24] Ibid. articles 282 et 283.
[26] Ibid. article 284, dernier alinéa.
[28] Deux avis Avis sur le paiement des indemnités de technicité du personnel administratif et technique des universités, Avis n°06/21 du 1er septembre 2021 et Avis sur l’octroi des indemnités des membres et du personnel de la Haute Cour Constitutionnelle, Avis n°05/21 du 1er septembre 2021, sont cités par le Rapport de la Cour des comptes de 2021, pour six avis émis en 2022.
[30] Le Tribunal financier d’Antananarivo a notamment eu à connaître d’un cas d’espèce de gestionnaires de fait dans la Commune rurale de Tanjombato en déclarant le Maire et le Régisseur de recettes conjointement et solidairement comptables de fait du 1er mars au 14 juin 2016 dans un jugement provisoire n°10/GF/20/JP du 7 octobre 2020, le Régisseur ayant manié des deniers publics en les décaissant sans autorisation légale, et le Maire s’ingérant dans les opérations de recettes et de dépenses sans avoir la qualité pour le faire.
[31] Loi n°2001-025 relatif au tribunal administratif et au tribunal financier, article 116.
[32] De nombreux textes ont été adoptés progressivement pour mettre en œuvre la décentralisation. Il s’agit notamment de la loi n°94-001 du 26 avril 1995 fixant le nombre, la délimitation, la dénomination et les chefs-lieux des Collectivités territoriales décentralisées ; la loi n°94-006 du 26 avril 1955 relative aux élections territoriales ; la loi n°94-007 du 26 avril 1995 relative aux pouvoirs, compétences et ressources des Collectivités territoriales décentralisées ; la loi n°94-008 du 26 avril 1995 fixant les règles relatives à l’organisation, au fonctionnement et aux attributions des Collectivités territoriales décentralisées ; la loi n°95-005 du 21 juin 1995 relative aux budgets des Collectivités territoriales décentralisées ; et la loi n°2004-001 du 17 juin 2004 relative aux Régions et ses textes d’application. Ces textes ont été abrogés par la loi organique n°2014-018 du 12 septembre 2014 qui détermine le cadre de gestion des affaires locales des collectivités territoriales décentralisées et la loi n°2014-020 du 27 septembre 2014 qui fixe les règles relatives à l’organisation, au fonctionnement, aux pouvoirs, aux compétences et attributions des Collectivités territoriales décentralisées.
[33] Constitution de la Première République du 29 avril 1959, articles 55 et suivants sur les collectivités territoriales.
[34] Ni la Constitution de la IIème République du 31 décembre 1975, ni la Charte de la transition du 9 août 2009 ne faisaient référence à l’organisation territoriale de l’État. La Constitution de 1992 prévoyait l’existence des provinces autonomes « dotées de la personnalité juridique ainsi que de l’autonomie administrative et financière » (articles 126 et suivants de la Constitution de 1992), tandis que la Constitution de la IVème République vient renforcer le cadre constitutionnel de la décentralisation en organisant sous le titre V le territoire de l’État malgache en reprenant les grands principes de la libre administration aux article 139 et suivants.
[35] Le décret n°2004-189 portant application de la loi n°2001-025 du 21 décembre 2001 relative au tribunal administratif et au tribunal financier prévoit, en son article premier, que « le tribunal administratif et le tribunal financier créés au Chef-lieu de chaque Province autonome commenceront à fonctionner dès l’installation des magistrats et du personnel les composant ». Ainsi, six tribunaux ont été créés pour chaque Chef-lieu de province, bien que les provinces ne soient pas opérationnelles.
[36] Contrairement au système français dont il s’inspire au sein duquel la Cour des comptes est une juridiction de l’ordre administratif, Conseil Constitutionnel 25 juillet 2001, Loi organique relative aux lois de finances, n°2001-448 DC.
[37] Constitution de la IVème République, article 121, complété par l’article premier de la loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004.
[39] Loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004, article 3
Suivant ce modèle, le greffe de la Cour Suprême est dirigé par un Greffier en chef secondé par trois adjoints affectés au greffe de chaque cour composant la Cour Suprême (Article 4 de la loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004).
[41] La loi organique n°2007-039 du 14 janvier 2008 relative au Conseil Supérieur de la Magistrature, article 2.
[42] Cour des Comptes, Plan Stratégique 2020-2024, 2020, page 17 ; Ministère de l’économie et des finances, Rapport 2021 sur la Performance de la Gestion des Finances Publiques à Madagascar sur la période 2018-2020, Antananarivo, 2021, page 92.
[43] Loi organique n°2004-036 du 1er octobre 2004, article 3.
[44] L’indépendance des juges de la Cour des Comptes est sous-jacente à l’indépendance des magistrats de manière générale prévue aux articles 107 et 108 de la Constitution. L’indépendance des juges en tant qu’ISC de Madagascar, elle, n’est pas consacrée par les textes constitutionnels, légaux ni réglementaires.
[45] Cour des Comptes, Plan Stratégique 2020-2024, 2020, pages 17-18.
[48] Cour des Comptes, Plan Stratégique 2020-2024, 2020.
[49] Voir notamment l’objectif stratégique n°4 pour un résultat stratégique attendu de crédibilité, visibilité et accessibilité de la Cour des Comptes au grand public, Cour des Comptes, Plan Stratégique 2020-2024, 2020, page 13.
[50] PEFA, Rapport 2021 sur la Performance de la Gestion des Finances Publiques à Madagascar sur la période 2018-2020, 2021, page 92.
[51] Initiative Émergence de Madagascar, 2018, article 137.
[53] Par la même loi, a été créé un tribunal administratif pour chaque chef-lieu de province à l’image des tribunaux financiers.
[54] Bien qu’en l’espèce, la décentralisation ne soit pas totalement effective par la nomination de gouverneurs de régions, et le fait que les provinces ne soient pas opérationnelles.
[55] Articles 9 et 10 de la loi n°2001-025 relative au tribunal administratif et au tribunal financier du 21 décembre 2001.
[56] Par ailleurs, en France, Gaston Defferre présente les chambres régionales des comptes comme « les filles de la décentralisation », voir DAMAREY S., Droit public financier, Paris, Dalloz, 2021, pages 371 et suivantes.
[57] Complété par l’article 11 de la même ordonnance sur son obligation de vérification des lois et règlements concernant la dépense considérée avant son engagement auquel les tribunaux font référence dans leur jugement. Voir notamment, Tribunal financier d’Antananarivo, Jugement définitif de débet n°22/GP/23/JD/DB du 9 mai 2023.
[58] Tribunal financier d’Antananarivo, Jugement définitif de débet n°22/GP/23/JD/DB du 9 mai 2023.
[61] Cour des Comptes, Rapport public 2022, pages 146 et suivantes.
[62] Voir notamment le sommaire du rapport ; Cour des Comptes, Rapport public 2022, p.i.
[63] Cour des Comptes, Rapport public 2022, page 50.
[66] Loi n°2001-025 relative au tribunal administratif et au tribunal financier du 21 décembre 2001, article 114.
[67] Tribunal financier d’Antananarivo, Jugement n°41/GP/12/JD/DB du 22 août 2012.
[68] Tribunal financier d’Antananarivo, Jugement n°35/GP/22/JD/REJ du 15 juin 2022.
Tribunal financier d’Antananarivo, Jugement n°10/GP/19/JD/RQ du 14 août 2019 pour des faits de gestion datant de 2002 à 2005 ; Tribunal financier de Toamasina, Jugement définitif n°2/2021/JD/TF/TOA du 12 mars 2021 pour des faits de gestion en 2013 ; Tribunal financier d’Antananarivo, Jugement définitif de débet n°05/GP/23/JD/DB du 1er février 2023 pour des faits de gestion en 2012.
Tribunal financier d’Antananarivo, Jugement définitif de débet n°22/GP/23/JD/DB du 9 mai 2023.
[71]Cour des Comptes, Rapport public 2022, République de Madagascar, page 176.
[72] Cour des Comptes, Plan Stratégique 2020-2024, 2020, p. 17.
[73] La loi n°2001-025 relative au tribunal administratif et au tribunal financier du 21 décembre 2001, article 115.
[74] Cour des Comptes, Rapport public 2022, pages138 et suivantes.
[75] Tribunal financier de Toliara, Avis n°04/22/AV/TF/TOL du 20 mai 2022.
[76] Ibid.
Voir également, Tribunal financier de Mahajanga, Avis n°01-TFM/CAB/22 ; Tribunal financier de Toliara, Avis n°04/PTF/TOL/2022/LP du 10 août 2022 (pour une saisine en date du 25 juillet 2022) ; Tribunal financier de Toamasina, Avis n°01/2021/PDT/TF/TOA (pour une saisine le 5 mai 2021) ; Tribunal financier de Toamasina, Avis n°02/2021/PDT/TF/TOA (pour une saisine le 5 mai 2021).
[78] Formation et sensibilisation à la bonne gouvernance aux responsables de la Commune Rurale d’Ikalalao, District d’Ambohimahasoa, Région Haute Matsiatra, 21 et 22 juillet 2022. Cette formation a permis aux autorités locales de se familiariser avec les attributions du Tribunal financier, la préparation et le vote du budget communal, la gestion, l’exécution et le contrôle budgétaire des recettes et des dépenses, et la transparence de l’exécution budgétaire.
[79] Cour des Comptes, Rapport public 2022, op. cit. page160.
[80] De nombreuses missions de formation et sensibilisation ont été menées dans la Grande Île par les tribunaux financiers afin de former les collectivités territoriales décentralisées sur la gouvernance financière et administrative, et les attributions des juridictions financières qui ont à connaître de la régularité de ces comptes, mais également qui contrôlent la gestion budgétaire de ces collectivités. Voir notamment, Cour des Comptes, Rapport public 2022, op. cit. pages160 et suivantes.
[82] Cour des Comptes, Plan Stratégique 2020-2024, op. cit. page 6.
[83] Cour des Comptes, Plan stratégique 2020-2024, op. cit. page 10.
[84] Loi n° 2004-036 du 1er octobre 2004 relative à l'organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant, articles 310 et 317.
Loi n° 2001 - 025 relative au tribunal administratif et au tribunal financier, article 141.
[85] Cour des Comptes, Plan stratégique 2020-2024, op. cit. page 2.
[86] Cour des Comptes, Rapport public 2022, pages 108-109.
[87] Cour des Comptes, Rapport définitif n°15/22-adm/audit/rod/or du sur le suivi des activités d’orpaillage dans les phases de production et de commercialisation - Cas de six Communes de la région de Betsiboka, 25 octobre 2022, page 2.
[88] Ministère de l’économie et des finances, Rapport 2021 sur la Performance de la Gestion des Finances Publiques à Madagascar sur la période 2018-2020, Antananarivo, 2021, page 108.
[89] Voir également article 44 de la loi organique n°2004 – 007 du 26 juillet 2004 sur les lois de Finances.
Cour des Comptes, Rapport définitif n°15/22-adm/audit/rod/or du sur le suivi des activités d’orpaillage dans les phases de production et de commercialisation - Cas de six Communes de la région de Betsiboka, 25 octobre 2022, page 2.
[92] Voir Cour des Comptes, Rapport public 2022, République de Madagascar, page 38.
[93] Cour des Comptes, Rapport public 2022, op. cit. page vi.
[94] L’audit de la période 2018-2021 a été publié en 2022, Cour des Comptes, Rapport public 2022, op. cit.
[95] France, Projet annuel de performances, 2021, programme n° 164 : Cour des comptes et autres juridictions financières, pages 4-5.
[96] Loi n° 2004-036 du 1er octobre 2004 relative à l'organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant, article 280.
[98] Cour des Comptes, Plan stratégique 2020-2024, op. cit. page 1.
[100] Ministère de l’économie et des finances, Rapport 2021 sur la Performance de la Gestion des Finances Publiques à Madagascar sur la période 2018-2020, Antananarivo, 2021, page 6.
[102] Mesure de la performance de la gestion des finances publiques en République de Madagascar selon la méthodologie PEFA, Volume 2 : Rapport Principal, 2008, page 102.
Ministère de l’économie et des finances, Compte général de l’administration des finances 2020, Antananarivo 2022, page 2.
[104] INTOSAI-Cour des Comptes, Rapport définitif n° 10 /20-rod/adm/ODD du 12 octobre 2020 sur l’audit de performance de l’état de préparation à la mise en œuvre des objectifs de développement durable à Madagascar - gestions 2015 à 2018, octobre 2020, page viii.
[105] Cour des Comptes, Rapport annuel 2022, op. cit. page 15.
[106] Loi n° 2004-036 du 1 er octobre 2004 relative à l'organisation, aux attributions, au fonctionnement et à la procédure applicable devant la Cour Suprême et les trois Cours la composant, article 288.
[107] Loi organique n°2004 – 007 du 26 juillet 2004 sur les lois de Finances, article 56.
[108] Cour des Comptes, Audit de la gestion du bas Fiavota par l’OPCI Lihemiha-Toliara, Rapport public 2022, page 111.
[109] Cour des Comptes, Évaluation de la politique et stratégie nationale d’assainissement - période 2008-2015 : une politique vouée à l’échec, op. cit. page 63.
[110] Cour des Comptes, Utilisation des ristournes minières issues du projet Ambatovy au profit des collectivités territoriales décentralisées à des fins de développement durable et inclusif : une performance insuffisante, Rapport public 2022, page 43.
[111] Loi n° 2016-055 portant Code des Marchés Publics, article 90- V. En cas de faute grave de nature à compromettre l’exécution normale du marché commise par le titulaire, à laquelle il n'a pas remédié malgré une mise en demeure, l’autorité contractante peut substituer une autre entreprise de son choix au titulaire défaillant et aux risques et périls de celui-ci, selon les modalités prévues par les cahiers des charges. Article 90-VI. Lorsque l’autorité contractante passe un marché de substitution avec le candidat classé après le cocontractant défaillant sur la base du dossier d’appel à la concurrence initial, les excédents de dépenses qui résultent du nouveau marché, sont prélevés sur les sommes qui peuvent être dues au cocontractant, ou à défaut, sur son cautionnement, sans préjudice des droits à exercer sur lui en cas d’insuffisance.
[112] Tribunal financier Antananarivo, Budget de la Commune urbaine d’Antananarivo – Gestions 2007-2008, Avis du 13 décembre 2019, 5 pages.
[113] Décret modifié n° 61-305 du 21 juin 1961 fixant les règles de gestion financière et d'organisation comptable applicables aux établissements publics à caractère administratif, article 99.
[114] Cour des Comptes, Audit des subventions reçues par la commune urbaine de Mahabo, Rapport public 2022, op. cit. page 119.
[115] Cour des Comptes, Contrôle des commandes publiques et de la comptabilité des matières de la commune urbaine d’Imerintsiatosika, Rapport public 2022, op. cit. page 122.
[116] Tribunal financier Antananarivo, jugement de débet n° 20/GP/23/JD/DB sur le compte de la commune urbaine d’Arivonimamo (gestion 2018). Voir également Cour des Comptes, Contrôle des comptes et de l’exécution du budget de la commune rurale d’Arivonimamo II, Rapport public 2022, page 131 : « Le Tribunal recommande à la Commune d’abandonner les pratiques non conformes aux lois et règlement sur les marchés publics notamment le manquement au respect des seuils pour les achats directs ». Voir également Cour des Comptes, Contrôle des achats publics et de la gestion du patrimoine de la commune rurale d’Ambatomirahavavy, Rapport public 2022, page 137 : « Ainsi le Tribunal propose à la personne responsable des marchés publics de la commune de respecter les procédures prévues par le Code des marchés publics… ».
[117] Tribunal financier Antananarivo, jugement de débet n° 20/GP/23/JD/DB sur le compte de la commune urbaine d’Arivonimamo (gestion 2018). op. cit. page 4.
[118] Idem Arrêté n°21 149/2016/MFB/SG/DCP/SSEPC du 13 octobre 2016, article 20, pour les communes rurales.
[119] Tribunal Financier Antananarivo, 23 novembre 2022, Jugement définitif n° 54/GF/22/JD/GF/AMDE déclaration de gestion de fait et d’amende à la commune urbaine d’Antsirabe.
[120] Cour des Comptes, Contrôle des comptes et de l’exécution du budget de la commune rurale d’Arivonimamo II, Rapport public 2022, page 131.